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A comme Autocensure

Nouvelle entrée pour le dictionnaire collaboratif de la conciliation vie privée / vie pro avec A comme autocensure grâce à Garance Yverneau, directrice et fondatrice de 5A Conseil, cabinet de conseil en gestion de carrière au féminin. Un grand merci à elle, n’hésitez pas à réagir !

A comme Autocensure

« Chaque jour, je vois se succéder des femmes dans mon bureau qui souhaitent évoluer ou changer de job. L’envie est là, sans conteste. Mais paradoxalement, je constate de manière imperceptible que quelque chose semble les freiner. J’entends régulièrement : « Je n’y arriverais pas », « je ne suis pas faite pour ça », « et si j’échoue ? »

Il y a une contradiction frappante entre ce blocage et la situation actuelle des femmes au travail. Elles sont en effet aujourd’hui plus diplômées que les hommes et représentent près de la moitié de la population active !

Mais alors, qu’est-ce qui freine les femmes dans leur évolution professionnelle ?

Tout naturellement, je pensais que l’une des barrières était la conciliation (le terme est parfois controversé, on évoque ici ou là le terme d’articulation) entre la vie familiale et la vie professionnelle. La disproportion des responsabilités familiales que les femmes assument n’est plus à démontrer. Celle-ci pèse considérablement sur la carrière des femmes et constitue un obstacle à leur progression.

Et puis je découvre un jour une étude qui démontre le contraire. La présence d’enfants ne serait pas un frein à l’avancement professionnel des femmes. Même si je considère ce résultat de manière prudente, force est de constater que cet obstacle n’est pas le seul et l’unique !

J’ai alors élargi ma recherche. Pourquoi les femmes ont-elles tendance à s’autocensurer ? Quel est ce phénomène psychologique et comment le dépasser ? Au fur et à mesure de mes lectures, je constate que les stéréotypes de genre semblent avoir une place centrale dans le processus d’autocensure. Voici quelques explications :

Les modèles de compétences sont sexués. Par exemple, on va plus naturellement attendre d’un homme qu’il soit leader et d’une femme qu’elle soit empathique. Les conséquences négatives pour les femmes sont indéniables. Comment peuvent-elles se projeter sur un poste plus élevé lorsqu’elles intègrent inconsciemment que ce poste requiert des aptitudes dites masculines ?

Les modèles de réussite « au féminin » sont minimes. Les hommes occupent majoritairement les postes à responsabilités, c’est un fait. Les femmes ont donc peu de modèles sur lesquels s’appuyer. Il est donc plus difficile pour elles de s’identifier à des modèles de réussite « au féminin ». Comment peuvent-elles alors s’imaginer qu’il est possible d’être une femme et occuper une place importante dans la sphère professionnelle ?

Les femmes éprouvent des difficultés à se considérer comme femme, mère et manager. Elles pensent inconsciemment qu’occuper des postes à responsabilités les oblige à mettre de côté leur identité de femme et/ou de mère. Pire, elles s’imaginent parfois qu’elles doivent adopter des comportements masculins pour évoluer professionnellement.

Les femmes manquent de confiance en elles. Elles ont conscience des stéréotypes négatifs qui pèsent sur elle, ce qui diminue leur estime de soi. Résultat ? Elles s’autocensurent de peur d’échouer. Ceci est un cercle vicieux. Elles n’osent pas, ne peuvent donc pas constater leur réussite, ce qui renforce leur mauvaise estime de soi et la peur de l’échec.

Conclusion ? L’impact de l’autocensure des femmes sur l’égalité entre les hommes et les femmes semble évident. Bien entendu, l’autocensure des femmes n’est pas l’unique raison, mais elle fait partie intégrante des freins à la mixité dans l’entreprise.

Il est bien plus difficile d’agir sur ce facteur, car il est invisible et concerne avant tout un profond changement des mentalités. Pourtant de nombreux leviers d’action sont possibles !

Au niveau individuel : les femmes doivent prendre conscience que cette autocensure n’est pas une fatalité. Vaincre sa peur et dépasser ses préjugés est possible. Reconnaître et accepter cette peur est une première étape. Se demander quelle serait la pire chose qui puisse arriver en changeant de job permet ensuite de relativiser. On imagine souvent le pire mais il arrive rarement ! Enfin, il ne faut pas stagner dans une réflexion paralysante, il faut agir ! Commencer petit et se féliciter des actions réussies permet de sortir du cycle infernal de l’autocensure.

Au niveau de l’organisation : Encore faut-il que les entreprises intègrent l’égalité professionnelle au niveau stratégique. Les politiques de diversité doivent tenir compte de l’autocensure des femmes sous l’angle des stéréotypes pour être efficaces.

Tout le monde à y gagner. D’abord parce qu’il s’agit d’un choix éthique sous-tendu par une égalité de droit. Ensuite parce que la loi sur l’égalité exige des objectifs et des résultats concrets. Enfin, favoriser la parité, c’est améliorer le bien-être des salarié(e)s, développer la marque employeur et accroître la performance ».

 

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