Témoignages vie privée / vie pro

Conciliation vie privée / vie professionnelle : Anne témoigne

En aparté poursuit sa série de témoignages sur le thème conciliation vie personnelle / vie professionnelle avec le témoignage d’Anne. Un grand merci à elle !

Quel est votre travail ?

Anne : journaliste pigiste depuis 17 ans pour la presse grand public (Version Fémina, Parents) et jeunesse (pour Milan presse) + co-auteur de 6 livres écrits avec des psys, pédo-psy, médecin, etc. J’ai aussi été directrice de collection aux éditions Milan pendant deux ans. Et j’ai fait quelques incursions dans des rédactions comme journaliste ou secrétaire de rédaction, mais je m’en suis vite échappée : je crois que je suis trop formatée à travailler seule.

Quelle est votre situation familiale ?

Mariée, trois enfants de 16, 14 et 7 ans.

Concernant la conciliation de votre vie professionnelle et de votre vie privée, êtes-vous globalement satisfaite ou insatisfaite (avec tous les degrés intermédiaires possibles !) ?

Vaaaaste interrogation ! Dans l’ensemble, je dirais que je m’en sors pas mal puisque la relative souplesse que mon donne mon statut me permet de concilier correctement les deux. Sauf que… En fait, je me rends souvent compte qu’en facilitant la vie de toute la famille, je me complique la tâche professionnelle en « raccourcissant » mon temps de travail; ou bien, je m’en veux, par exemple, de n’avoir pas été productive un mercredi – car même avec trois enfants et même depuis le temps qu’ils sont là, je m’obstine à allumer mon ordi le mercredi !

Enfin, dans les périodes de speed (notamment au moment de rendre un manuscrit pour l’édition), je travaille en flux tendu, souvent le soir et un peu le week-end. Donc, là, ça déborde dans l’autre sens, c’est le travail qui prend beaucoup de place. Mais en même temps, je suis consciente que c’est le principe de ce job, où les frontières sont floues entre les moments où je travaille et les moments où je fais autre chose.

Quel est le point précis qui complique le plus cette conciliation vie privée/vie professionnelle ?

Paradoxalement, c’est ma présence !! Même si mes enfants ont compris comment je travaille, ils ont du mal à faire comme si je n’étais pas là… Il y a des jours où j’aimerais bien aller travailler en bibliothèque, ou ailleurs que chez moi, pour qu’ils se rappellent que
jusqu’à telle heure, je ne suis vraiment pas disponible, même si le prof de maths a fait une interro surprise ou même si la meilleure copine de ma fille lui a raconté un truc passionnant !

Parfois, comme leur père travaille lui aussi à la maison (deux jours par semaine, depuis 10 mois), je leur fais remarquer à quel point tout le monde a pris l’habitude qu’on peut me déranger alors qu’ils ne le font pas avec leur père ! Il est vrai que l’endroit où je travaille est superbe mais situé pile au milieu de la maison et sans porte – donc idéal quand il y a personne – alors que le « bureau » s’est improvisé dans notre chambre… située au bout de notre maison. Mais bon, soyons honnête : je sais bien que la porosité entre ma vie de travail et ma vie de famille ne tient pas seulement au lieu où je travaille !

Quelle est la mesure ou l’action (de votre entreprise, de votre entourage, de la ville où vous vivez…) qui vous aiderez à mieux concilier vie privée/vie professionnelle ?

Que j’arrive à accepter de déléguer le ménager à quelqu’un. Quand je dis « accepter », c’est sur deux plans : d’abord, accepter des restrictions financières pour se libérer du ménage ; et dans la vie quotidienne, accepter que 3 heures par semaine, quelqu’un s’occupe de tout cela. Je l’ai fait des années, mais honnêtement, je ne dois pas être une employeuse géniale car bien souvent, on discutait pendant un moment, et au final leur présence ne me dégageait pas beaucoup de temps. Bref, étant peu douée pour dire aux gens que j’emploie comment je voudrais qu’ils travaillent, j’ai renoncé. Et je fais moi-même… le plus vite possible !

Avez-vous le sentiment d’avoir faire des concessions dans votre vie privée pour votre vie professionnelle ? Ou, au contraire, des concessions dans votre vie professionnelle pour votre vie privée ? Si oui, lesquelles ? Et les regrettez-vous ou non ?

Des concessions dans ma vie privée? Oui, pour mes deux premiers enfants, je me rends compte que j’ai repris trop vite après le congé maternité. En bonne « mélangeuse » des deux vies, j’ai repris le travail très tôt pour le premier, en me disant « ce papier, je ne peux pas le
refuser, sinon je perdrai ce client. Je vais faire garder mon petit bébé par mon frérot : un après-midi de boulot, ce n’est quand même pas ça qui va me tuer ». Pour le second bébé, mon mari était en poste à la fac où il gagnait peu, donc je n’avais pas trop le choix : je me suis dépêché reprendre les piges. Pour la troisième, heureusement, j’ai pris mon temps et j’en suis très contente.
Je me suis enfin permise de me dire qu’un bébé, on n’en fait pas 10 ou 20 par an, alors que des articles, si.

Je pourrai aussi citer des concessions sur ma manière d’exercer mon job ; j’aurais pu choisir de faire plus de reportages terrain, ici ou à l’étranger (en même temps, je ne suis pas sûre que j’aurais excellé en reportage en Iran ou au Liban !) ou bien de travailler en radio ; à un moment, j’ai bossé comme pigiste à Radio France, dans une radio locale. Mais pour intégrer le système de Radio France, normalement, il faut tourner de radio locale en radio locale avant de trouver le super Graal, un CDI. Pour moi, c’était inenvisageable, tout simplement, avec un mari et deux petits gars pas très hauts : j’ai laissé tomber l’idée ! 

Des concessions dans l’autre sens ? Oui, j’en ai fait deux essentielles. La première, c’est de quitter Paris dont je suis originaire, pour suivre mon mari (non parisien) dans ses postes. Pour travailler avec une rédaction, c’est bien sûr possible d’être loin, mais parfois,
ç’aurait été plus simple d’être à proximité : montrer sa trombine régulièrement, c’est important. Et parfois, quand vous habitez à Paris, on vous propose de « rentrer » dans la rédac pour un CDI qui se libère, un remplacement de congé mater’, etc.

Cela dit, ce choix de l’éloignement me plaît aujourd’hui infiniment : on est très heureux ici, je suis très heureuse de venir à Paris sans y vivre et tant pis si ça coûte un peu d’argent de prendre souvent l’avion mais pour le coup, c’est un rythme fort agréable : je vais faire un tour dans mon Paris adoré, je bosse, vois des amis, ma famille et zou, je reviens dans ma campagne.
Seconde concession : l’argent. J’ai choisi la pige au début parce que je ne trouvais pas de poste fixe (à 22-25 ans); puis parce que ça m’allait bien avec mes petits bébés pas très grands ; puis, aujourd’hui, parce que je me rends compte que ça correspond très bien à mon caractère, plutôt indépendant et parfois « rétif » aux contraintes qu’on vit en entreprise (les horaires, les objectifs de l’entreprise, des opens space mal fichus – du moins, ceux que j’ai vécus – etc.); Mais la pige a une contrepartie : on ne gagne pas toujours génialement bien sa vie. ça me contrarie certains mois, mais en même temps, il faut savoir ce que je veux : j’ai tendance à privilégier un boulot mal payé mais super intéressant plutôt que l’inverse. Donc, aujourd’hui, j’aime ce que je fais… et je ne m’étonne plus de ne pas être richissime.

Quels sont les petits « luxes » que vous vous accordez rien que pour vous et auxquels vous êtes attachées ?

1/ Ne pas vraiment travailler à temps plein et savoir en profiter (la grande leçon de mes années de pige, c’est  d’arrêter de m’en vouloir quand je n’ai rien foutu un matin, et d’apprendre à savoir quand je bosse bien, pour ne pas rater le coche : j’utilise les moments où je suis peu performante, par exemple début d’après-midi, pour passer les coups de fil aux maisons d’édition pour être au courant des dernières parutions. Pas besoin d’être au top pour enregistrer ce type d’infos. De même, les jours où je dois écrire vite et bien, je n’ouvre pas ma boîte mail pour ne pas être tentée de répondre à un mail, puis à un autre, puis encore un autre… et perdre ainsi une heure ou deux. Je me fixe aussi des objectifs accessibles chaque jour : avant, quand j’écrivais un livre, je me disais « je dois faire 12
feuillets par jour ». A la fin de la semaine, je m’en voulais d’être aussi lente. Maintenant, je dis « 5 feuillets minimum »… et je suis fière de tenir le rythme. 

2/ Prendre un thé avec une de mes plus proches amies, pigiste elle aussi, et savourer la chance qu’on a de pouvoir se réserver 3 heures dans la journée, tout en se disant qu’on bosse un peu (puisque on se parle des sujets qu’on prépare)

3/ Faire du sport en semaine, quand j’ai envie. Je prends mes baskets et zou, je m’échappe pendant 40 minutes.

4/ Et avoir le plaisir de vivre ce rythme aux côtés de mon mari depuis quelues mois. Mais hélas, il vient de prendre un nouveau travail : nous n’aurons plus, ensemble, ces fenêtres de liberté !

Si vous aussi, vous avez envie de témoigner, n’hésitez pas à m’envoyer un petit mail via le lien Contact

One thought on “Conciliation vie privée / vie professionnelle : Anne témoigne

  1. J’ai aussi des problèmes dans la gestion de ma femme de ménage : je me sens mal à l’aise, je n’ose pas lui faire de remarque. Quand je suis à la maison, je lui fait du café et on bavarde.
    Du coup elle ne sert pas à grand chose et quand elle part en vacances je n’ai pas l’impression d’un changement.
    En fait elle est là parce que mon conjoint tenait absolument à en avoir une (mais c’est moi qui la paye )

      

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