Témoignages vie privée / vie pro

Conciliation vie perso / vie pro : Clémence témoigne

IMG_3039Les témoignages autour de la conciliation vie perso / vie pro se poursuivent. Après Raphaël, j’ai le plaisir de vous présenter le parcours de Clémence, mariée, 4 enfants et psychologue. Un grand merci à elle pour sa confiance et ce partage !

Peux-tu retracer en quelques mots ton parcours professionnel et personnel ?

Après un bac littéraire, j’ai commencé des études de psychologie, dans l’idée d’obtenir une licence et de devenir professeur des écoles, mais rapidement j’ai eu le sentiment d’avoir trouvé ma voie. Je me suis spécialisée en psychologie de l’enfant et de l’adolescent. Pendant mon DESS, je me suis mariée ; nous avons décidé d’avoir nos enfants rapidement : résultat 4 enfants rapprochés 😉 Pendant ces années, j’ai décidé de me mettre en pause au niveau professionnel. En parallèle, je me suis investie bénévolement dans des associations et des écoles. Nous avons vécu successivement à Cholet, Bordeaux et Brest en raison de l’activité professionnelle de mon mari.

Quand nous sommes arrivés sur Brest, j’ai cherché du travail mais pas en tant que psychologue, car je ne me sentais pas prête après une pause de 10 ans. J’ai été AVS (auxiliaire de vie scolaire) pendant trois ans, je m’occupais d’enfants avec des troubles du comportement, autisme… Ce fut une expérience enrichissante et formatrice, et cela me permettait d’avoir le même rythme que les enfants. On m’a proposé un poste de psychologue scolaire mais nous avons alors déménagé en Mayenne. Cela fait maintenant 4 ans.

Je travaille depuis trois ans à temps partiel comme psychologue au sein d’un EHPAD (établissement d’hébergement pour personnes âgées dépendantes), j’assure le suivi des résidents et de leurs familles. J’ai la chance de travailler au sein d’un établissement qui nous permet de faire des formations chaque année (en gérontologie, géronto-psychiatrie, ou sur des problématiques particulières), d’assister à des congrès ou à des séminaires. J’ai également pu suivre un MOOC sur la maladie d’Alzheimer.

En parallèle, je me suis installée en libéral en 2014. Ce fut un grand saut dans le vide, au début j’étais assez stressée de me retrouver seule face aux problématiques des patients. Mais finalement ça s’est fait tranquillement, petit à petit. Et j’apprécie de gérer les choses à ma façon. J’ai eu la chance de pouvoir bénéficier d’une partie des locaux professionnels de mon mari. Donc j’ai peu de charges, c’est un grand confort et une pression en moins.

Je trouve que l’assurance vient avec l’expérience. Je reçois aussi bien des enfants, des adolescents, que des adultes ou des personnes âgées. Ils viennent me voir pour des problématiques très diverses : troubles du sommeil, dépression, burn out, phobie scolaire, deuil….

Pour me faire connaître, j’ai rencontré les médecins généralistes de la ville, ainsi que les orthophonistes, les psychomotriciens, les psychiatres, les autres psychologues… Maintenant, nous travaillons en réseau, nous nous envoyons mutuellement des patients.

Je prends de plus en plus de plaisir à mon activité en libéral, surtout la thérapie adulte. A chaque fois, c’est une nouvelle problématique, une nouvelle histoire de vie. Comment aider la personne à avancer, comment l’accompagner dans la crise qu’elle est en train de traverser ?

Je travaille au cabinet à mi-temps, le mardi, le vendredi et un samedi sur deux. Ces jours-là, je rentre assez tard le soir, vers 21h, les créneaux en soirée étant les plus demandés. C’est mon mari qui prend la relève auprès des enfants. Nous avons trouvé un équilibre.

Je ne sais pas encore si nous allons repartir un jour car cela prend du temps de se faire un réseau, que ce soit dans sa profession (assurances) ou la mienne. Mais savoir que l’on peut toujours faire ce choix de changer de région est important pour moi  !

As-tu eu l’impression au cours de ton parcours de faire des concessions soit dans la sphère perso soit dans la sphère pro ? si oui, en regrettes-tu certaines ?

Non, je n’ai pas eu l’impression d’avoir fait des concessions. Nous avions envie d’avoir des enfants rapidement et j’avais vraiment le souhait de m’en occuper durant leurs premières années. La contrepartie de ce projet était de mettre en parenthèse mes projets professionnels. Mais je ne l’ai pas fait dans un esprit de sacrifice. Ce qui a été parfois difficile, c’est quand on me proposait un poste alors que nous étions sur le point de déménager. Mais je me disais que chaque chose viendrait en son temps ! Et c’est ce qui est arrivé. Aujourd’hui, je peux m’investir professionnellement. Mes enfants ont entre 11 et 17 ans, ils sont plus autonomes, ils ont moins besoin de moi. Donc je peux avoir une vraie vie professionnelle, un espace à moi.

Que représente ton métier et plus généralement la vie professionnelle ?

Pour moi, l’objectif de mon travail est de me rendre utile. Je voulais trouver ma place dans la société, mettre mes compétences et mes qualités au service des autres. Utiliser ce que je suis pour accompagner les personnes.

J’ai la chance d’avoir deux activités très différentes. En tant que libérale, je suis indépendante, je prends les décisions seule, avec le stress que ça peut générer. En institution, je travaille avec une équipe pluridisciplinaire ce qui est très riche, même si il y a la lourdeur institutionnelle, la confrontation à des équipes qui ont souvent le sentiment d’être face à des injonctions paradoxales (être à l’écoute des patients et en même temps être efficace, faire les choses en un temps limité tout en prenant soin de la personne…). Il faut apprendre à travailler avec ce sentiment d’impuissance et de frustration.

Par ailleurs, tous les mois, je suis supervisée par une psychologue plus âgée. Cela me permet de lui parler des situations qui me posent question, qui me déstabilisent… Cela me semblait indispensable, pour avoir un autre regard, mieux comprendre ce qui se joue, mettre la distance nécessaire. J’appelle aussi régulièrement des collègues psychologues avec lesquelles j’échange de façon plus informelle. Avoir ces différents éclairages est très précieux.

Au départ, mon travail avait tendance à beaucoup m’envahir, certaines situations me « remplissait la tête » et je me rendais bien compte que j’étais moins disponible pour ma famille. Puis j’ai appris peu à peu à faire la part des choses, à prendre du recul et à mieux séparer le pro et le perso. Plus ça va, mieux j’arrive à gérer cela.

A la maison je n’essaie pas d’être psy. Les enjeux affectifs faussent les choses, je suis mère avec mes enfants, je ne suis pas leur psy. En revanche, être psychologue donne un regard particulier, une attention et une observation particulière de certains signaux. Si je sens que cela peut être utile, je fais facilement appel à une collègue pour mes enfants.

La conciliation pro / perso, le partage des tâches, est-ce un sujet dont tu discutes régulièrement avec ton conjoint ? Est-ce que cela donne parfois lieu à des désaccords, voire à des conflits” ? Comment parvenez-vous à un compromis / consensus ?

On en parle surtout quand il y a des changements dans l’organisation. Pendant les premières années, ne travaillant pas à l’extérieur, c’est moi qui me suis occupée majoritairement des enfants et de la maison. Petit à petit nous avons dû repenser les choses ; cela a nécessité des réajustements, avec parfois quelques grincements de dents 🙂 Maintenant plus le temps passe, plus l’équilibre est bon, moins il y a de tensions sur ce sujet.

Par ailleurs, on demande aussi plus de choses aux enfants, on les responsabilise. Comme je le disais plus haut, en grandissant, ils deviennent plus autonomes. En revanche, ils demandent encore beaucoup en terme d’écoute. Parfois lorsque je rentre à 21h après avoir été à l’écoute de mes patients pendant la journée, je ne suis pas très disponible pour être à leur écoute, alors j’essaie de différer à un autre moment si c’est possible. Ils peuvent comprendre maintenant.

Concernant l’éducation des enfants, quels sont les points sur lesquels tu es particulièrement attentif / vigilant ? Quelles valeurs souhaites-tu leur transmettre ? As-tu là encore l’impression de changer, d’évoluer sur certains points ?

Mon objectif est de les aider à trouver leur place dans le monde. Je souhaite leur donner les moyens de trouver une voie dans laquelle ils se sentiront bien et où ils pourront s’accomplir, en étant conscients de tout ce qu’ils sont et en le valorisant.

Je pense effectivement que j’ai évolué dans ma façon de les élever. Je suis plus attentive à ce qui m’importe. J’avais un modèle éducatif mais je ne suis pas sûre qu’il me correspondait vraiment. Je me fais plus confiance en tant que mère ; je suis moins sensible à ce que les autres attendent de moi.

Parviens-tu à t’offrir des moments rien que pour toi ? Et pour ton couple ? Est-ce important pour toi ?

J’y arrive plus ou moins. Depuis quelques mois, je marche deux fois par semaine avec des amies, cela me fait beaucoup de bien, être dans la nature, faire de l’exercice. J’adore bouquiner aussi. Quant aux moments à deux… on aimerait toujours qu’il y en ait plus 😉

Comment te projettes tu d’ici quelques années ?

Dans quelques années, j’aimerais augmenter mon temps en institution et au cabinet, et continuer à me former pour me spécialiser dans certaines problématiques (comme les soins palliatifs, le Haut Potentiel, la psychogénéalogie…) J’aime la formation et la confrontation à des personnes et à des idées différentes, et continuer à me nourrir pour améliorer ma pratique et éviter la monotonie.

2 thoughts on “Conciliation vie perso / vie pro : Clémence témoigne

  1. « Pour moi, l’objectif de mon travail est de me rendre utile. Je voulais trouver ma place dans la société, mettre mes compétences et mes qualités au service des autres. »
    C’est exactement ce que j’ai toujours pensé aussi. Plus qu’une indépendance ou autonomie financière (même si cela compte aussi), c’est ce qui a toujours fait que j’ai continué à travailler même avec 5 enfants.
    Merci pour ce portrait.

      

  2. C’est vrai que ce n’est pas facile de tout concilier. Mais je comprends ce sentiment profond d’utilité qui anime Clémence. Je vis la même chose au quotidien et il est quelquefois difficile de s’y retrouver. Il faut continuer de donner et partager en tout cas. Merci Clémence !

      

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