Lu pour vous

En aparté a lu pour vous « Le courage des femmes » d’Edwige Antier

Sur les conseils d’une amie, je viens de lire « Le courage des femmes«  d’Edwige Antier, pédiatre, diplômée en psychapathologie de l’enfant et députée. Bien sûr, en tant que femme, on ne peut que savourer le titre, en se disant que cette reconnaissance de nos multiples talents et rôles est bien agréable !

Selon elle, malgré les grandes avancées obtenues par les féministes (maîtrise de la procréation, indépendancefinancière, etc.), jamais les femmes n’ont subi autant de pressions au quotidien : mettre au monde des enfants mais rester séduisante pour son mari, allaiter mais rester disponible pour tous, travailler pour être indépendante mais continuer de prendre en charge la sphère familiale…Autant d’exploits quotidiens accomplis par les femmes mais à quel prix !

Les exemples sont nombreux de ces petites violences au quotidien qui maintiennent les femmes sous pression et dans la culpabilité. À force de trop exiger des femmes, le risque d’épuisement, voire de rupture guette…

Edwige Antier milite ici pour une écoute plus attentive des femmes ; et pour l’information des hommes qui doivent comprendre que l’implication des mères comme des pères est la seule garantie d’un bon équilibre des enfants et du couple. Il est temps de passer à une coexistence où homme et femme se respectent en tant qu’individu, loin de toute volonté de soumission ou d’exclusion de l’un ou l’autre.

Elle écrit : « on ne peut pas dire « Je veux être un bon père », sans être un bon mari ». Elle s’insurge contre le discours selon lequel les femmes doivent faire la place au père. « L’homme est assez grand, qu’il la prenne cette place, qu’il aide sa femme, qu’il s’intéresse à ses enfants. Ce ne sont pas les femmes qui confisquent la place des hommes. Celles que je vois tous les jours dans mon cabinet seraient bien contentes que leur mari sache préparer des pâtes » (dans une interview parue dans le Journal du dimanche du 25 octobre 2009).

Le tableau est assez noir  : elle montre que ce sont les femmes qui assurent 90% du soutien scolaire, qui s’occupent à 90% des enfants handicapés (même si les hommes restent, ce ne sont pas eux qui assurent le quotidien, écrit-elle) et des parents âgés. Elle rappelle qu’une femme meurt tous les trois jours sous les coups de son compagnon, sans parler des viols quotidiens, « dans une société où la pornographie inonde la télévision et internet ». Elle raconte les femmes qui se font quitter alors qu’elles sont enceintes ou lorsque l’enfant n’a que quelques années, accusées d’être trop mère pas assez femme.

Ce que j’en ai pensé : disons le tout de suite, ce livre n’est pas très optimiste, voire démoralisant. D’un autre côté, c’est elle qui reçoit en consultation ces femmes et ces mères, ce n’est pas moi…

Certaines de ses positions me semblent un peu tranchées (le plaidoyer pour le co-spleeping parent-enfant envisageable jusqu’aux 3 ans d ‘enfant, sa grade méfiance de la garde alternée, ses conseils aux femmes trompées…). Certaines recettes me semblent un peu désuètes également.

Quelques réflexions justes : elle dénonce par exemple ce qu’elle appelle « l’heure des machos » (à partir de 18h, l’heure des réunions importantes et des conciliabules entre hommes tandis que les femmes partent vite s’occuper des devoirs, des bains, des histoires ou écouter les histoires de leurs ados).

Elle regrette également le manque de reconnaissance des métiers humains (qui demandent un don de soi pour peu de profit matériel). Elle écrit : « dans notre culture, s’occuper d’un jeune enfant, ce n’est pas important, à tel point que le salaire horaire d’une aide familiale est moindre lorsqu’elle s’occupe de l’enfant que lorsqu’elle se consacre au ménage ». Et elle note que « lorsqu’une profession se paupérise, elle se féminise (en évoquant les métiers de la petite enfance, de l’enseignement, de la santé).

L’ouvrage veut avant tout rendre attentif les hommes et déculpabiliser les femmes, sans s’opposer aux hommes. N’empêche qu’ils en prennent largement pour leur grade !


12 thoughts on “En aparté a lu pour vous « Le courage des femmes » d’Edwige Antier

  1. Je n’ai pas lu ce livre. En revanche, j’avais lu il y a quelques année « l’éloge des mères » du même auteur et sur des thématiques assez proches: la reconnaissance de l’instinct maternel
    et de la fragilité de la femme mère (à notre époque où les femmes travaillent, sont parfois isolées, presque toujours critiquées dans leur façon d’être mère…), le rôle du père.  Je
    me souviens d’avoir lu ce livre peu de temps après la naissance de mon fils ainé et d’avoir été émue et réconfortée!

      

  2. Bravo a l’auteur de ces lignes pour l’analyse tres fine du livre d’Edwige Antier. Je viens de lire le livre et il se trouve qu’Edwige est le pédiatre de mes enfants. J’ai été frappé par les mêmes
    choses qu’en apparté: son avis le cosleeping et la réaction a avoir en cas d’homme qui vous trompe. Mieux vaut ranger sa fierté et ne pas dire au mari, deja fragilisé, que l’on a découvert sa
    double vie, sous peine de le blesser. Bien sur. Pour le reste, merci a Edwige de reconaitre que c’est nous qui faisons tout. Je vous renvoie aussi, cheres lectrices à un article récent du magazine
    ELLE dénoncant l’arnaque des nouveaux peres, qui certes s’impliquent daventage dans l’education de leurs enfants, savent les changer et lire des histoires et aussi les ammener au tennis. Mais ne
    prennent jamais en charge une activité de A a Z (demande du certificat médical, inscription, achat du petit jogging…) Les temoignages qui jalonnent le livre sont en tout cas assez représentatifs
    des familles que rencontre la pédiatre mais qui sont essentiellement parisiennes et, au vu de ses tarifs prohibitifs (100€ la consult, quand même!) relativement aisées. A la derniere page, j’ai
    aussi poussé un soupir de soulagement pour n’avoir pas reconnu sous sa plume les travers de ma petite progeniture, ou de mes propres erreurs (genre comme cette mere de famille, jounaliste, dont le
    fils Achille fait n’importe quoi…) OUF!

      

  3. @ Véronique : moi, c’était le premier livre que je lisais d’elle. Dans ce livre aussi, il y a un côté réconfortant et gratifiant pour les femmes (déjà le
    titre…) mais la situation reste bien sombre selon elle.

    @ Claire : j’aime bien quand on reconnait ma finesse d’analyse  (ceci est une private joke pour ceux et celles qui liraient cette réponse). Et ta conclusion m’a bien fait rire  ! En tout cas, moi, j’ai bien aimé m’entendre traiter d’héroïque (bon, d’un homme, cela serait encore mieux, mais c’est déjà
    bien, non ?).

      

  4. Je n’ai pas lu ce livre mais j’ai aussi lu cet article de Elle. Les hommes ne font pas rien , mais ils  font ce qu’ils ont envie, le temps ou  la capacité de faire ? That is the question.
    Très bon exemple de la gestion des activités des enfants par l’homme : il est dispo le weekend pour aller aux match mais le certif médical c’est nous, parce que nous on sait mieux que lui où
    est rangé le carnet de santé du petit, nous on a plus l’habitude de l’emmener chez le médecin (l’école appelle tojours maman en premier quand il se transforme en vomito géant), nous on est pas à la
    réunion d' »hommes » de 18h. 
    Les femmes ont fait de grandes avancées mais peut on changer les choses si rapidement ? Il y a encore 50 ans la majorité des femmes ne travaillaient pas pour garder leurs enfants, et
    aujourd’hui, elles maîtrisent leur procréation, elles votent, elles travaillent, elles ont un compte en banque, elle ont pris de plus en plus de place dans la société. Aux hommes maintenant de
    prendre leur place à côté de nous dans cette nouvelle société qui change. Mais qui gouverne nos hommes : des hommes qui sont nés il y a 50 ans, quand leur mère n’avait pas beaucoup de place, alors
    ils restent sur leur mode de fonctionnement planplan. Je ne veux pas les excuser de ne pas voir que la société bouge mais j’aimerai bein leur donner un coup de pied aux fesses ! et les
    gars, on est là !

      

  5. @ Babsgirl : moi, je ne l’ai pas lu cet article de Elle ! mais on dirait qu’il faudrait vraiment que je le déniche 🙂 . En tout cas, espérons que
    quelques hommes passent par là pour entendre vos messages !!!

      

  6. est ce que par hasard sa vision pessimiste de la place des femmes ne viendrait pas d’une expérience malheureuse vécue sur le tard avec un mari détournant l’argent d’une association dont elle était
    présidente pour donner de l’argent à son fils à lui soi disant sans qu’elle ne voit rien ?

      

  7. @ Pas loi : j’avoue que je n’avais pas pensé à cette épisode la concernant. Elle relate ce qu’elle voit et entend dans son cabinet de consultation et ne parle
    que très peu de son cas personnel (sauf quelques choix professionnels effectués lorsque ses enfants étaient jeunes mais n’évoque pas son couple).
    Mais il est probable que l’événement dont tu parles a dû la marquer…

      

  8. La lecture du blog m’a donné envie de lire le livre, que j’ai bien aimé et trouvé réconfortant par bien des aspects.
    Je regrette de n’avoir pas eu l’occasion de lire dans ma jeunesse qu’il n’était pas absolument abominable de prendre bébé dans son lit, ce qui me laissait le choix entre : céder à la tentation
    et culpabiliser à mort, ne pas dormir, dormir par terre dans la chambre de l’enfant (état lamentable garanti le lendemain dans tous les cas…).
    De même la plupart des réflexions sur la vie de couple me paraissent plutôt justes, et j’ai retenu en particulier le problème de la répartition des revenus, rarement abordé ailleurs.

    Seule la vision de l’entreprise me paraît un peu étrange : je n’y travaille pas moi-même mais d’après les échos autour de moi je n’ai pas vraiment l’impression que le cadre sup de base somnole et
    lit le journal en attendant la fameuse réunion de 18h00…?

    J’avais lu, sur le même thème mais dans un style bien plus léger « Le corset invisible » d’Eliette Abécassis et Caroline Bongrand.

      

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