L’ORSE vient de publier les résultats d’une étude sur les attentes des Français à l’égard des entreprises dans le domaine de l’équilibre travail et vie familiale.
– les aménagements d’horaires et la mise en place de structures d’accueil des jeunes enfants sont le 2 principales attentes des Français pour mieux concilier vie professionnelle et vie familiale.
– 81% des Français sont conscients qu’une large partie des inégalités professionnelles prend sa source dans la répartition déséquilibrée des tâches domestiques et familiales.
Mais ce ne sont pas tant ces résultats qui sont intéressants (car ils n’apprennent pas grand-chose de nouveau, me semble-t-il) mais plutôt les témoignages de décideurs et les contributions de chercheurs (Dominique Méda, Rachel Silvera, Sylviane Giampano) qui sont joints à cette étude.
Des hommes et des femmes, aux vies professionnelles très denses et de haut niveau, répondent à des questions sur l’égalité professionnelle, leur propre expérience, leurs idées pour faire progresser les chose, mais également les freins qu’ils jugent inéluctables (Frédéric Tiberghien, président d’honneur de l’ORSE, ancien chef d’entreprise, dit « si je vois un père qui me dit à 17h ou à 18h « je dois partir pour chercher mon enfant à la crèche », j’ai une réaction non pas de père, mais de chef d’entreprise, en me disant : c’est incompatible avec le degré de responsabilité qu’il occupe »). Cela a le mérite de la franchise !
Une autre remarque de Jean-Luc Vergne, DRH de PSA Peugeot-Citroën, mérite réflexion :
« (Pour faire carrière), la première chose, c’est la volonté et les compétences. Faire carrière oui, mais encore faut-il avoir les qualités et les aptitudes. Je ne voudrais pas laisser croire qui si, à partir de demain, le mari fait tous les soirs les tâches ménagères le problème de la carrière de la femme sera résolu. Pour les femmes qui veulent réussir, il faut beaucoup de volonté, mais c’est vrai chez les hommes aussi ».
Je pense que ce point est effectivement important. On entend beaucoup que les inégalités domestiques sont à l’origine des inégalités professionnelles. Je suis en grande partie d’accord mais ce n’est pas aussi simple que cela. Certes, le fait pour une femme d’avoir en grande partie la charge des tâches domestiques et familiales pèse lourdement sur ses choix professionnels, sa progression, sa disponibilité mais il ne faut pas occulter également le fait que certaines femmes ne tiennent pas tant que cela avoir des postes à très hautes responsbilités. Car concientes des sacrifices que cela nécessite (disponibilité, stress, responsabilités, mobilité), elles ne sont pas toujours prêtes ou en demande. En écrivant cela, je ne pense pas être réactionnaire ou anti-féministe mais réaliste. Mais le débat est bien sûr ouvert !! Je vais demander à Olympe ce qu’elle en pense, par curiosité.
Autre point plus mineur : l’allongement du congé paternité ne me semble pas un levier très important pour la promotion de l’égalité professionnelle. Certes c’est une très bonne chose si le père prend quelques jours de plus à la naissance de son enfant. Mais soyons clairs, ce ne sont pas ces quelques jours supplémentaires qui vont changer profondément les choses. C’est sur la durée que les choses se compliquent et que des choix doivent être faits, quand les enfants grandissent (RV chez les médecins, à l’école, activités extra-scolaires, suivi des devoirs, vacances scolaires, etc., tout cela demande du temps et de l’investissement).
Enfin, selon Dominique Meda, « la balle est clairement dans le camp des entreprises ». Je suis partiellement d’accord. Je pense que la balle est aussi clairement dans le camp des individus eux-mêmes (hommes et femmes). Les hommes sont-ils prêts à prendre en charge les tâches familiales quotidiennes, en ont-ils toujours envie ? Et les femmes sont-elles toujours prêtes à prendre des postes à responsabilités, à s’investir beaucoup professionnellement ? Et à lâcher du lest dans la sphère privée ? Sont-elles toujours claires elles mêmes avec leurs ambitions professionnelles ?
Je reviendrai plus longuement sur ce sujet passionnant et complexe. Mais là, je souhaitais être volontairement un peu polémique 🙂
Le débat est ouvert !
Moui… Plus qu’au débat, je m’arrête aux faits. Lesquels sont très parlants.
Signalons qu’en Allemagne, un cadre qui reste après 18h est considéré comme non efficace. C’est une histoire de culture et de rapport à l’organisation. C’est intéressant, de voir les résultats de cette vision du monde : l’Allemagne détient quand même la palme de l’efficacité au plan économique.
Guylaine
je suis tout à fait d’accord avec toi pour dire qu’il y a en France une culture du présentéisme très dommageable (aux femmes notamment) mais je pense aussi que lorsque l’on atteint un haut niveau de responsabilité, il est difficile de partir à 18h tous les jours, d’éviter des dîners ou événements professionnels le soir, etc. Cela me semble un peu incompatible quand même, non ?
Gaëlle
Tout à fait !
Guylaine
je crois bien que je ne connaissais pas ton blog
puisque tu me demandes mon avis…
– tu écris « le fait que certaines femmes ne tiennent pas tant que cela avoir des postes à très hautes responsabilités. » il est probablement vrai que la société telle qu’elle est organisé est une société de concurrence et les femmes sont moins la dedans. mais d’une part, et là je parle surtout des femmes cadres, beaucoup de femmes cadres ont les mêmes ambitions que les hommes mais se heurtent au plafond de verre et le fait qu’elles hésitent davantage que les hommes à sacrifier leur vie familiale ne suffit pas à expliquer leur absence du top management.
par contre le partage des responsabilités familiales est un préalable indispensable. il est important que les hommes puissent s’investir à la maison. Ils sont d’ailleurs très demandeur( du moins pour les enfants parceque le ménage c’est autre chose !). Cela permettra aux entreprises de s’organiser différemment. Si plus personne n’est d’accord pour aller aux réunions le soir il n’y aura plus de réunions le soir, si les hommes s’arrêtent sur une longue durée quand ils ont un enfant les jeunes femmes ne seront plus regardé comme des absentes potentielles.
je milite pour que les femmes puissent concilier tout : les enfants qu’elles veulent, les boulots qu’elles veulent et pour cela la société doit être organisée différemment et la problématique du temps doit devenir une problématique de tous pas seulement celle des femmes.
et les femmes doivent avoir de l’ambition parcequ’il est anormal que notre monde soit construit uniquement par les hommes (on voit le résultat!)
Olympe
merci Olympe pour ta participation. Je ne remets pas du tout en cause les inégalités professionnelles et l’existence du plafond de verre (je crois que malheureusement, nous avons toutes des exemples autour de nous qui en attestent…sans oublier les retours de congés maternités qui se passent mal, les préjugés des employeurs ou des recruteurs face à des femmes en âge d’avoir des enfants ou avec des enfants) mais je voulais juste nuancer l’affirmation selon laquelle les inégalités professionnelles proviendraient des inégalités domestiques et familiales. Comme tu le dis le partage des responsabilités familiales est très important (un préalable), mais je ne pense pas que cela soit suffisant. Il me semble qu’il y a d’autres éléments importants. Et par exemple, je ne suis pas entièrement convaincue par l’allongement du congé paternité comme moyen de promouvoir une vraie évolution des mentalités et des comportements. Et je pense aussi que les femmes ont parfois du mal à oser.
Mais bien évidemment, que les entreprises, l’organisation du travail, les politiques de ressources humaines, la gestion des temps fassent en sorte que les femmes puissent concilier au mieux enfants et carrières, je suis entièrement pour 🙂
Gaëlle